Lorsqu’Antoine Roulet a éprouvé des difficultés à jouer de la flûte à cause de sa main, il a fini par consulter. On lui a alors diagnostiqué la sclérose latérale amyotrophique (SLA).
Photos : Andreas Zimmermann
« Je m’étais imaginé qu’une fois vieux je passerais l’été dans mon chalet au mont Soleil à jardiner et à jouer sur ma flûte baroque pendant mon temps libre. Autant dire que j’aurais souhaité une autre vieillesse que celle qui m’attend. Mais on n’a pas toujours le choix. » Antoine Roulet sourit, assis dans un fauteuil installé dans la chambre de son deux-pièces situé à La Chaux-de-Fonds. Par la porte fermée, on perçoit le bruit d’un aspirateur; l’aide-ménagère nettoie la cuisine, la salle de bains et le salon. Âgé de 61 ans, il raconte qu’il a pu demander une aide pour toutes sortes de travaux dans la résidence Le Corbusier, où il habite depuis un an. « Mais pour moi, il est important que je puisse vivre en étant le plus autonome possible, même si j’ai moins de force et que je dois faire des pauses régulièrement. » Antoine Roulet souffre de sclérose latérale amyotrophique ou SLA. Il s’agit d’une pathologie incurable caractérisée par une dégénérescence rapide du système nerveux provoquant une atrophie musculaire, une perte de tonicité et des spasmes. L’origine de la maladie est inconnue.
Des symptômes en jouant de la flûte
Antoine Roulet a remarqué que quelque chose n’allait pas il y a quatre bonnes années. À cette époque, il jouait de la flûte parfois pendant six heures pendant ses jours libres. « Tout à coup, mon index a commencé à faire des petits bonds que je ne pouvais pas contrôler. » Lorsque les mouvements involontaires ont empiré, il a pris rendez-vous chez un chirurgien. « Pensant avoir un doigt à ressaut, je voulais me faire opérer. » Lors de l’examen, le chirurgien a toutefois remarqué que M. Roulet n’avait quasi plus de muscles entre l’index et le pouce. « Il m’a orienté vers une neurologue et vers l’hôpital de Neuchâtel pour des examens complémentaires. Je pense qu’il savait déjà ce que j’avais. »
Maraîcher, pédagogue médical, musicothérapeute
Quand Antoine Roulet réfléchit, il s’enfonce dans son fauteuil et regarde dans le lointain à travers ses lunettes rondes. Quand il commence à parler, il repenche son torse maigre vers l’avant, sourit par intervalle et s’essuie la bouche et la barbe avec un mouchoir. La maladie semble n’avoir encore aucun impact sur son appareil phonatoire; Antoine Roulet parle lentement mais distinctement. Et il a beaucoup de choses à raconter.
À l’âge de deux ans, il a déménagé avec sa famille de Neuchâtel à Heerbrugg (SG), car son père, un biochimiste, y avait décroché un poste intéressant. « À l’école, j’étais un rêveur. » C’est pourquoi il a vite intégré un internat Rudolf Steiner. Cela lui a bien plu, et c’est là qu’il a eu la révélation de sa passion pour la musique. Après un apprentissage de maraîcher et une formation de pédagogue médical, il s’est installé en Irlande, où il a travaillé pendant six ans dans un institut pour enfants en situation de handicap sévère. Il a découvert par l’intermédiaire d’un collègue le métier de musicothérapeute, qui lui a tellement plu qu’il a suivi une formation à Berlin. Puis il est retourné en Irlande pendant douze ans. « Nous étions comme une grande famille, nous vivions et travaillions au même endroit. C’était éprouvant, mais j’ai aussi vraiment beaucoup appris, en particulier sur le plan des relations humaines », confie Roulet.
«Cela me manque de faire de la musique»
Cela fait douze ans qu’Antoine Roulet est revenu en Suisse et qu’il travaille dans un établissement pour personnes en situation de handicap mental. Il a dû adapter son temps de travail à sa maladie. « Mes forces ont nettement décliné, je suis devenu plus lent. Je ne peux donc plus gérer un groupe. » Avant qu’il ne se casse le poignet lors d’une malencontreuse chute, il travaillait aussi comme musicothérapeute. Reste à savoir s’il pourra continuer à le faire. « Mes mains font parfois ce qu’elles veulent. » Pour la première fois, une expression de chagrin passe sur son visage. « Cela me manque énormément de faire de la flûte », dit-il avant de faire quelques secondes de pause.
Puis il sourit à nouveau. «Pour le reste, je continue à vivre ma vie.» Ainsi, il aime aller au musée, il passe régulièrement plusieurs jours au mont Soleil et il planifie des vacances avec sa sœur, même si cela n’est plus aussi simple qu’auparavant. « J’ai beaucoup de rendez-vous médicaux et je dois penser à certaines choses lorsque je dors ailleurs », dit-il en désignant son lit. Sur la table de chevet se trouve un appareil de ventilation de la Ligue pulmonaire et à côté un pied à perfusion. En raison de sa forte perte de poids, Antoine Roulet a dû se faire poser une sonde gastrique. Le respirateur l’aide à respirer la nuit. «La Ligue pulmonaire m’a très bien conseillé pour l’ajustement du masque respiratoire et pour la manipulation de la machine.» Son soutien a aussi concerné le domaine social puisqu’elle l’a aidé à trouver un appartement adapté et à déposer une demande auprès l’assurance-invalidité. «J’apprécie vraiment le conseil et la prise en charge complets de la Ligue pulmonaire.»
Voir le positif
En dépit de toutes les restrictions, Antoine Roulet ne se plaint pas. Lorsqu’il s’est informé sur la maladie sur Internet et qu’il a découvert la faible espérance de vie en cas de SLA, il a fermé la page aussitôt et ne l’a jamais rouverte. Mais il ne craint pas la mort. «Je suis fermement convaincu qu’une partie de moi reviendra.» Et il sait également apprécier le fait d’avoir été en bonne santé pendant de nombreuses années. Travailler avec des personnes handicapées lui a justement montré que cela n’allait pas forcément de soi. «C’est pour cela que j’essaie d’accepter ma maladie et de voir le positif.»
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La Ligue pulmonaire accompagne les personnes atteintes de SLA
La sclérose latérale amyotrophique (SLA) est une maladie dégénérative du système nerveux. La pathologie touche les muscles des bras et des jambes ainsi que les appareils phonatoire et manducateur et souvent aussi les muscles respiratoires, ce qui aboutit à une limitation de la fonction pulmonaire. À l’aide d’un appareil de ventilation à pression non invasif, les muscles de la respiration bénéficient d’une assistance optimale dans de tels cas. La ventilation a lieu généralement la nuit, car la tension musculaire et, par conséquent, l’activité des muscles respiratoires diminuent pendant le sommeil. Si une ventilation utilisant l’air ambiant ne suffit pas, il peut être nécessaire d’apporter un supplément d’oxygène. Le même appareil peut remplir ces deux fonctions.
La Ligue pulmonaire
Ioue des appareils, procède aux réglages individuels et montre aux malades et à leurs proches comment les manipuler et ce qu’il faut faire en cas de situations critiques.
soutient les personnes atteintes en procédant à l’ajustement individuel du masque respiratoire pour un confort optimal.
organise les livraisons d’oxygène avec les fournisseurs.
aide à intégrer la thérapie dans le quotidien des malades et de leurs proches.
assure une assistance simple et rapide via la hot line disponible 24 heures sur 24 pour les situations de crise afin d’élaborer une solution optimale avec les personnes concernées.
coordonne et organise le conseil et le suivi avec les organisations partenaires.
propose un conseil psychosocial pour les personnes malades et leurs proches.
Une association pour les personnes atteintes de SLA
Développer la sclérose latérale amyotrophique (SLA) marque un profond tournant. L’association SLA Suisse soutient les personnes malades et leurs proches en les mettant en relation les uns avec les autres, en diffusant de précieuses informations et en fournissant un conseil pour les questions d’ordres administratif et juridique.